Les travailleurs des plateformes sont des salariés comme les autres
L’arrêt de la chambre sociale de la cour de cassation du 28 novembre 2018 (n° 17-20.079) ouvre les yeux sur une réalité : les travailleurs pour les plateformes de mises en relation comme Déliveroo, Take Eat Easy (maintenant disparu) ou Uber sont des salariés comme les autres.
L’absence de contrat de travail n’entraîne pas l’exclusion du salariat.
« L’existence d’une relation de travail ne dépend ni de la volonté exprimée par les parties ni de la dénomination qu’elles ont donnée à leur convention mais des conditions de fait dans lesquelles est exercée l’activité des travailleurs »
En l’absence de contrat de travail, ce qui permet de déduire l’existence du salariat c’est l’existence d’un lien de subordination.
Il y a un travailleur qui est sous les ordres d’un employeur.
La question se posait pour les plateformes et l’arrêt rendu fin novembre 2018 se prononce en ce qui concerne les travailleurs de la société Take Eat Easy.
Pour qu’il y ait subordination il faut qu’il y ait « l’exécution d’un travail sous l’autorité d’un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d’en contrôler l’exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné »Cela est issu d’une jurisprudence constante depuis l’arrêt société générale de 1996 (Cass. Soc., 13 novembre 1996, n° 94-13.187).
Pour ce qui est de la plateforme Take Eat Easy, c’est elle qui propose les périodes de travail et qui fournit les clients et leurs commandes. Il y a donc fourniture d’ordres et de directive.
Le contrôle se fait par la géolocalisation constante du travailleur.
Le pouvoir de sanction se traduit dans les nombreux malus que la plateforme peut donner au travailleur. La sanction peut aller jusqu’au blocage de la plateforme. Le travailleur ne pourra plus travailler, il s’agit donc d’une sanction équivalant au licenciement.
Le lien de subordination entre la plateforme et l’employeur est caractérisé. Il y a donc un salariat déguisé. Le travailleur aura droit à la requalification de son contrat et au rattrapage de ses droits ainsi qu’à des dommages-intérêts.
Cette décision ne restera pas sans conséquences. Il se pourrait que beaucoup de « travailleurs indépendants » demandent la requalification de leur contrat.
Cela ne laissera pas les plateformes sans un certain embarras.
Toutefois cette jurisprudence pourrait se voir contredire par une loi contraire qui serait votée et qui aurait une autorité supérieure à la jurisprudence de ce 28 novembre 2018.
Affaire donc à suivre de très près donc.
Pour voir la décision : https://www.courdecassation.fr/jurisprudence_2/chambre_sociale_576/1737_28_40778.html