Le temps de travail et la durée légale du travail (Partie VII)
c/ Sur la mise en place du travail de nuit
Le recours au travail de nuit doit :
- Être exceptionnel ;
- Prendre en compte les impératifs de protection de la sécurité et de la santé des travailleurs ;
- Être justifié par la nécessité d’assurer la continuité de l’activité économique ou des services d’utilité sociale.
Ces dispositions sont d’ordre public.
Comme l’a précisé la Cour de cassation dans un arrêt du 24 septembre 2014 « |…] selon l’article L. 3122-32 du code du travail » [devenu L. 3122-1] « interprété à la lumière de la directive 93/104 du 23 novembre 1993 concernant certains aspects de l’aménagement du temps de travail, le recours au travail de nuit est exceptionnel. Il prend en compte les impératifs de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs et est justifié par la nécessité d’assurer la continuité de l’activité économique ou des services d’utilité sociale ; il en résulte que le travail de nuit ne peut pas être le mode d’organisation normal du travail au sein d’une entreprise et ne doit être mis en œuvre que lorsqu’il est indispensable à son fonctionnement ».
Compte tenu de ces principes, le travail de nuit peut être mis en place dans une entreprise ou un établissement par un accord collectif.
A défaut d’accord, des travailleurs peuvent être affectés à des postes de nuit après autorisation de l’inspecteur du travail (dispositions « supplétives »).
Dans tous les cas, les travailleurs de nuit bénéficient de garanties spécifiques.
Quelles que soient les modalités de sa mise en place, le recours au travail de nuit, la modification de ses modalités ou l’extension à de nouvelles catégories de salariés, doit être précédé de la consultation du comité social et économique.
Le médecin du travail est également consulté avant toute décision importante relative à la mise en place ou à la modification de l’organisation du travail de nuit.
Le passage d’un horaire de jour à un horaire de nuit (ou l’inverse) constitue une modification du contrat de travail qui doit être acceptée par le salarié (en ce sens, par exemple, arrêt de la Cour de cassation du 27 février 2001).
Ce principe est également valable en présence d’une clause stipulant que l’horaire de travail ne constitue pas un élément essentiel du contrat et qu’il peut être changé en fonction des besoins de l’entreprise, une telle clause ne pouvant avoir pour effet d’imposer une telle modification au salarié (en ce sens, par exemple, arrêt de la Cour de cassation du 22 septembre 2009).
d/ Sur la mise en place du travail de nuit par accord collectif
La mise en place du travail de nuit dans l’entreprise ou l’établissement, ou son extension à de nouvelles catégories de salariés, peut être prévue par un accord d’entreprise ou d’établissement ou, à défaut, une convention ou un accord collectif de branche.
Cette convention ou cet accord collectif prévoit :
- Les justifications du recours au travail de nuit ;
- La définition de la période de travail de nuit, dans les limites mentionnées aux articles L. 3122-2 et L. 3122-3 du Code du travail ;
- Une contrepartie sous forme de repos compensateur et, le cas échéant, sous forme de compensation salariale ;
- Des mesures destinées à améliorer les conditions de travail des salariés ;
- Des mesures destinées à faciliter, pour ces mêmes salariés, l’articulation de leur activité professionnelle nocturne avec leur vie personnelle et avec l’exercice de responsabilités familiales et sociales, concernant notamment les moyens de transport ;
- Des mesures destinées à assurer l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes, notamment par l’accès à la formation ;
- L’organisation des temps de pause.
Présomption de conformité
La convention ou l’accord collectif mentionné ci-dessus est présumé négocié et conclu conformément aux dispositions de l’article L. 3122-1 du code du travail.
e/ Sur la mise en place du travail de nuit en l’absence d’accord collectif
A défaut de convention ou d’accord collectif et à condition que l’employeur ait engagé sérieusement et loyalement des négociations en vue de la conclusion d’un tel accord, les travailleurs peuvent être affectés à des postes de nuit sur autorisation de l’inspecteur du travail accordée notamment après vérification des contreparties qui leur sont accordées (repos compensateur et, le cas échéant, compensation salariale) et de l’existence de temps de pause.
L’engagement de négociations loyales et sérieuses implique pour l’employeur d’avoir :
- Convoqué à la négociation les organisations syndicales représentatives dans l’entreprise et fixé le lieu et le calendrier des réunions ;
- Communiqué les informations nécessaires leur permettant de négocier en toute connaissance de cause ;
- Répondu aux éventuelles propositions des organisations syndicales.
La demande de l’employeur est effectuée dans les conditions et selon les modalités précisées par l’article R. 3122-9 du Code du travail.
L’inspecteur du travail fait connaître sa décision dans un délai de 30 jours à compter de la date de réception de la demande à l’employeur et aux représentants du personnel. En cas de contestation de la décision ainsi prise, un recours hiérarchique peut être formé dans les conditions précisées par l’article R. 3122-10 du Code du travail.
Création : Décembre 2020 – MAJ : /