Le prêt de main d’œuvre à but non lucratif
Pour faire face à des difficultés de recrutement dans certains secteurs en tension ou pour éviter le chômage partiel en cas de baisse d’activité, une entreprise peut avoir recours au prêt de main-d’œuvre.
Les opérations de prêt de main-d’oeuvre à but non lucratif sont donc autorisées.
L’employeur met alors des salariés à la disposition d’une autre entreprise utilisatrice pendant une durée déterminée. Ce dispositif est prévu à l’article L. 8241-2 du code du travail.
Le prêt de main-d’œuvre doit obligatoirement être à but non lucratif.
L’entreprise prêteuse doit uniquement facturer à l’entreprise utilisatrice les salaires versés aux salariés, les charges sociales qui y sont liées et les frais professionnels remboursés au salarié.
Le prêt de main d’œuvre doit respecter un formalisme strict pour éviter des montages frauduleux d’utilisation du personnel :
A/ Sur l’accord préalable et explicite du salarié concerné
Cet accord, qui est indispensable, prend la forme d’un avenant au contrat de travail, signé par le salarié.
Si ce dernier refuse la mise à disposition, il ne peut pas être sanctionné, licencié ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire.
L’avenant doit préciser les tâches confiées dans l’entreprise utilisatrice, les horaires et lieu d’exécution du travail, les caractéristiques particulières du poste de travail et la période probatoire ainsi que sa durée définie par accord entre l’entreprise prêteuse et le salarié.
La mise à disposition ne peut affecter la protection dont jouit un salarié en vertu d’un mandat représentatif.
B/ Sur la convention de mise à disposition
Cette convention, signée entre l’entreprise prêteuse et l’entreprise utilisatrice par salarié prêté, doit mentionner les éléments suivants :
– La durée de la mise à disposition ;
– L’identité et la qualification du salarié mise à disposition ;
– Le mode de détermination des salaires, des charges sociales et des frais professionnels facturés à l’entreprise utilisatrice par l’entreprise prêteuse.
C/ Sur les Représentants du Personnel (RP)
Les RP sont consultés à travers le Comité Social et Économique (CSE).
Une consultation préalable à la mise à disposition est prévue par le code du travail :
1/ S’agissant du CSE de l’entreprise prêteuse :
– Une consultation préalable à la mise en œuvre du prêt de main-d’œuvre et information des différentes conventions signées doit avoir lieu ;
– Une information préalable lorsque le poste occupé dans l’entreprise utilisatrice par le salarié mis à disposition figure sur la liste de ceux présentant des risques particuliers pour la santé ou la sécurité des salariés mentionnée au second alinéa de l’article L. 4154-2 du Code du travail.
2/ S’agissant du CSE de l’entreprise utilisatrice, une information et consultation préalable à l’accueil de salariés prêtés est prévue.
Toutefois, une consultation dans les meilleurs délais, le cas échéant concomitamment à la mise à disposition pourrait être admise par le juge. En effet, en cas de circonstances exceptionnelles, le défaut de consultation préalable ne constitue pas un délit d’entrave, dès lors que l’élément intentionnel de l’infraction est exclu (Cass. Soc., 30 octobre 1984 N° de pourvoi: 83-94370).
D/ Sur la protection du salarié mis à disposition
Pendant la période de prêt (durée de mise à disposition), le salarié ne conserve qu’un seul employeur, le signataire du contrat de travail et de l’avenant. Ce dernier continue à le rémunérer.
Le contrat de travail qui lie le salarié à l’entreprise prêteuse n’est ni rompu, ni suspendu.
Le salarié continue d’appartenir au personnel de l’entreprise prêteuse et de bénéficier des dispositions conventionnelles, comme s’il exécutait son travail dans son entreprise d’origine.
Les conditions d’exécution du travail sont celles de l’entreprise utilisatrice et déterminées par les dispositions légales et conventionnelles applicables sur le lieu de travail en matière de : durée du travail, travail de nuit, repos hebdomadaire et jours fériés, santé et sécurité au travail, travail des femmes, des enfants et des jeunes travailleurs.
Le contrat de travail n’étant ni rompu ni suspendu, le salarié conserve les couvertures pour Accident du Travail (AT) et Maladie Professionnelle (MP), pendant la durée de la mise à disposition.
Les obligations relatives à la médecine du travail sont à la charge de l’employeur, sauf exceptions.
En cas d’accident du travail ou de maladie professionnelle pendant la mise à disposition, l’intégralité du coût de l’AT ou de la MP est supportée par l’employeur.
Il en va de même en cas de faute inexcusable de l’entreprise utilisatrice.
Toutefois, l’employeur dispose d’une action récursoire en vue de se faire rembourser par l’entreprise utilisatrice les indemnités complémentaires dont il aura à s’acquitter.
Les équipements de protection individuelle sont fournis par l’entreprise utilisatrice. Certains équipements peuvent être fournis par l’employeur quand ils sont définis par convention ou accord collectif. Le salarié ne doit pas supporter la charge financière des équipements de protection individuelle.
Le salarié a accès dans les mêmes conditions que les autres salariés de l’entreprise utilisatrice aux moyens de transports collectifs et aux installations collectives, notamment de restauration.
L’entreprise prêteuse et le salarié peuvent convenir que le prêt de main-d’œuvre est soumis à une période probatoire au cours de laquelle il peut y être mis fin à la demande de l’une des parties.
Cette période probatoire est obligatoire lorsque le prêt de main-d’œuvre entraîne la modification d’un élément essentiel du contrat de travail.
La cessation du prêt de main-d’œuvre à l’initiative de l’une des parties avant la fin de la période probatoire ne peut, sauf faute grave du salarié, constituer un motif de sanction ou de licenciement.
Le salarié mis à disposition, dans l’exercice de son activité, ne se trouve pas placé sous la subordination directe de l’entreprise utilisatrice mais il peut faire présenter ses réclamations individuelles et collectives intéressant les conditions d’exécution du travail, d’accès aux moyens de transports collectifs et aux installations collectives par les membres du Comité Social et Économique de l’entreprise utilisatrice, dans les conditions fixées par le Code du travail.
Les membres du Comité Social et Économique de l’entreprise utilisatrice peuvent prendre connaissance de la convention de mise à disposition conclue entre l’employeur et l’entreprise utilisatrice.
À l’issue de la période de prêt, le salarié retrouve son poste de travail d’origine, ou un poste équivalent dans l’entreprise prêteuse, sans que l’évolution de sa carrière ou de sa rémunération n’en soit affectée.
E/ Sur les sanctions éventuelles
Des sanctions pénales, prévues aux articles L. 8234-1, L. 8234-2 et L. 8243-1, L. 8234-2 du Code du travail et administratives, prévues aux articles. L. 8272-1, L. 8272-2 et L. 8272-4 du Code du travail sont prévues en cas de recours à un prêt illicite de main d’œuvre, en particulier lorsque l’opération a pour objet ou pour effet de réaliser un bénéfice quelconque pour l’entreprise prêteuse.
Par exemple en cas de facturation à l’entreprise utilisatrice de sommes supérieures aux salaires et remboursement de frais versés au salarié prêté pour la période.
Création : Mai 2020 – MAJ : /