Sur la notion de « projet important » nécessitant le recours au CHSCT
Le recours au CHSCT
Où sont les certitudes sur ce qu’est, ou n’est pas, un projet important ?
L’importance étant une notion relative et la difficulté de définition est majeure.
D’autant qu’en présence d’un projet ayant ce qualificatif, l’employeur ne peut pas contester le recours à l’expertise par le CHSCT, Cass. Soc., du 18 décembre 2012, n° 11-17.634.
Il s’agit donc d’une notion qui relève de l’appréciation souveraine des juges du fond.
Les juges du fond jouent un rôle décisif dans la classification des projets selon leur importance, et se montrent favorables au recours à l’expertise, tendance renforcée par la montée en puissance des risques psychosociaux.
Peut-être considérée comme importante, une mesure ne concernant pourtant qu’une faible partie du personnel, en témoigne, la jurisprudence afférente aux conditions du recours à l’expertise par le CHSCT, parfois hésitante, qui a été amenée à faire évoluer sa ligne.
L’importance du projet ne doit pas être évaluée en fonction du seul nombre de salariés concernés en témoigne l’arrêt de la Cour de cassation Soc., du 10 février 2010, n° 08-15.086, qui énonce « que le seul nombre de salariés concernés ne détermine pas, à lui seul, l’importance du projet », « Le fait qu’un projet ne concerne pas un nombre significatif de salariés ne permet pas en soi d’exclure la consultation du CHSCT ».
La prise du contrôle du concept de « projet important » est ici utilisée pour affirmer que le nombre des salariés concernés n’est pas, ou plus, un critère décisif de l’importance.
Ce n’est donc pas tant le nombre de salariés impactés que l’incidence sur chacun des salariés qui détermine si le projet est important ou ne l’est pas, ce que d’autres décisions confirment.
Un projet de restructuration entraînant un transfert de salariés peut donc donner lieu à une expertise, quand bien même les conditions de travail concernent un très petit nombre d’entre eux.
Il a été considéré que la mise en œuvre d’un projet de restructuration et de licenciement collectif pour motif économique justifiait la consultation du CHSCT en raison de l’état de stress que pouvait générer un tel projet et des conséquences sur les conditions d’emploi des salariés non impactés, charge de travail notamment.
A titre d’exemple, il peut être cité le TGI de Toulouse en date du 3 février 2011, n° 11/00114 qui a ainsi ordonné en référé la suspension du projet de cessation d’activité de l’établissement et du projet de licenciements économiques afférents et enjoint l’employeur de consulter le CHSCT sur ce projet avant de recueillir l’avis du CE, en relevant que le CHSCT doit être consulté lorsque « la cessation d’activité projetée est susceptible de modifier les conditions de santé des salariés concernés ».
Le TGI relève qu’il résulte « des conclusions de l’expertise mise en œuvre à la demande du CHSCT que les impacts psychiques sur les salariés concernés par le plan de cessation d’activité, et confirmés par le médecin du travail, sont extrêmement importants et placent ceux-ci dans une situation délétère quant à leur sérénité et santé ».
Enfin, l’expertise peut se glisser partout et être le plus souvent rangées dans la catégorie des projets importants :
- Les restructurations internes et externes ;
- La réorganisation des forces de vente, selon l’arrêt de la Cour d’Appel de Versailles, du 17 janvier 2007 ;
- La négociation d’un accord dans l’entreprise ;
- L’introduction, dans le règlement intérieur de dispositions pour le dépistage de produits stupéfiants Cas Soc. 2012) ;
- L’augmentation du nombre des périodes d’astreintes ;
- Le changement d’horaires affectant les salariés postés ;
- Le recours à la sous-traitance ;
- L’évaluation des salariés ;
- L’introduction de nouvelles technologies.
Toutefois, si le nombre de salariés n’est pas, ou plus, décisif, encore faut-il que le projet ait une portée collective, au moins potentiellement.
MAJ 30/09/2017